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Les 15 moteurs de recherche les plus influents (et pourquoi Google n’est PAS Internet)

À force d’entendre “je vais sur Google” à la place de “je vais sur Internet”, on finit par croire que le web a été inventé par une bande d’ingénieurs californiens en sweat à capuche. Spoiler : non. Internet existait avant Google, vivra après Google, et s’est construit grâce à une longue série de moteurs de recherche dont beaucoup ont aujourd’hui disparu des radars.

Voici donc un tour d’horizon de 15 moteurs de recherche qui ont vraiment compté dans l’histoire du web. Certains sont morts, d’autres règnent encore sur leur marché, tous prouvent une chose : Google est très fort, mais loin d’être toute l’histoire.


1. Archie – le dinosaure de la recherche (1990)

Avant même les pages web comme on les connaît aujourd’hui, il y avait Archie. Il ne cherchait pas dans des sites, mais dans des listes de fichiers sur des serveurs FTP. Une sorte d’index géant de dossiers poussiéreux.

Ce n’était pas glamour, pas grand public, mais c’était déjà le principe : Internet devient trop grand pour être parcouru à la main, il faut un moteur. Google n’a pas inventé ce problème, il est arrivé longtemps après.


2. WebCrawler – le moteur qui lisait vraiment les pages (1994)

Avec WebCrawler, on passe un cap : le moteur commence à indexer le texte complet des pages web, pas seulement les titres. Pour l’époque, c’est presque de la magie : on peut chercher dans le contenu lui-même.

Il sera ensuite écrasé par la concurrence, puis par Google, mais l’idée est posée : un moteur digne de ce nom ne se contente pas de survoler, il fait l’inventaire.


3. Lycos – quand la recherche se mélange aux portails (1994)

Lycos, c’est le web des années 90 dans toute sa splendeur : un moteur de recherche collé à un portail fourre-tout (mail, actualités, jeux, chat, etc.). On venait chercher une info, on repartait après 45 minutes, sans savoir comment.

Il a habitué des millions d’utilisateurs à l’idée qu’on pouvait “chercher sur Internet”. À cette époque, nul besoin de “googler” quoi que ce soit : Google n’existait pas encore.


4. AltaVista – la première grosse claque technologique (1995)

Pour toute une génération, AltaVista, c’était le vrai moteur sérieux : rapide, puissant, plein d’options. Pendant quelques années, il a été la référence pour la recherche web.

Il a prouvé qu’on pouvait combiner vitesse, index massif et requêtes complexes. Google n’a pas inventé le moteur “qui marche bien” : il a juste fait mieux, plus tard.


5. Yahoo! – des annuaires triés à la main au géant du web (1994)

À l’origine, Yahoo! n’était même pas un moteur : c’était un annuaire humain. Des gens classaient les sites dans des rubriques (Art, Sport, Finance…). Puis l’annuaire devient portail, le portail devient empire.

Pendant un bon moment, “aller sur Internet”, pour beaucoup, signifiait “ouvrir Yahoo!”. Ironie ultime : Yahoo! affichera longtemps des résultats… fournis par Google. Comme quoi, même les géants peuvent servir de vitrine à d’autres.


6. Excite – le presque grand qui a raté le coche (1995)

Excite a été un moteur important dans les années 90, avant de se faire gentiment oublier. L’anecdote célèbre : il aurait pu racheter Google pour une somme dérisoire à ses débuts. Il a dit non. Le reste appartient à la catégorie “mauvaises décisions historiques”.

Excite rappelle qu’un acteur peut être grand un moment, puis disparaître. Aucune domination n’est garantie, même en search.


7. Ask Jeeves / Ask – poser des questions comme à un humain (1996)

Ask Jeeves (puis Ask) arrive avec une idée simple et brillante : autoriser l’utilisateur à poser des questions en langage naturel. On tapait “Comment…”, “Pourquoi…”, etc., bien avant que l’IA soit à la mode.

La technologie n’était pas encore au niveau, mais le concept anticipait déjà la recherche conversationnelle. Non, Google n’a pas été le premier à se dire que les humains posent des questions complètes, pas seulement des mots-clés.


8. HotBot – le moteur des utilisateurs “avancés” (1996)

HotBot, adossé à la technologie Inktomi, a longtemps été le moteur préféré des utilisateurs un peu geeks : options de filtrage, requêtes complexes, possibilités d’affinage… le paradis des amateurs de réglages.

Il a lentement perdu en visibilité, mais il incarne une époque où on imaginait le moteur comme un outil puissant à manipuler, pas seulement une boîte blanche au milieu d’une page.


9. MSN Search → Live Search → Bing – l’anti-Google de Microsoft (2005+)

Microsoft ne pouvait pas rester spectateur. Après MSN Search puis Live Search, arrive Bing. Jamais numéro 1 mondial, mais loin d’être ridicule.

Bing nourrit :

  • la recherche sur Windows,
  • plusieurs partenariats (Yahoo! a longtemps utilisé sa techno),
  • et aujourd’hui une partie des expériences de recherche assistée par IA.

Tout ce qui n’est pas Google n’est pas forcément “nul”. C’est juste moins connu… parce qu’on ne l’a pas collé partout dans le système d’exploitation de la planète.


10. Baidu – le maître de la Chine (2000)

En Chine, le moteur qui compte s’appelle Baidu, pas Google. C’est le point d’entrée principal vers le web chinois, avec ses propres règles, sa censure et son écosystème.

Dire “Internet = Google” à un utilisateur chinois, c’est un peu comme dire que la cuisine mondiale se résume à un seul fast-food. Disons que ça trahit surtout une géographie numérique très limitée.


11. Yandex – l’autre géant, côté Russie (1997)

En Russie, le moteur historique, c’est Yandex. Il a ses propres algos, ses propres services (cartes, mail, taxi, etc.), et une part de marché qui a longtemps tenu tête à Google sur son territoire.

Conclusion : dans certains pays, Google n’est pas “le moteur par défaut” mais un acteur parmi d’autres. L’univers de la recherche est plus vaste que ce que voient les utilisateurs occidentaux.


12. Naver – la référence sud-coréenne (1999)

En Corée du Sud, on ne dit pas “Google” par réflexe, mais très souvent Naver. Moteur, portail, contenus, Q/R, blogs… Naver mélange tout ça et domine son marché local.

Là encore, ça rappelle que le monde ne se résume pas au trio “Google – Chrome – Android”. Il existe des écosystèmes entiers qui vivent très bien sans être centrés sur Google.


13. Seznam – le moteur tchèque qui a résisté (1996)

En République tchèque, Seznam a longtemps été le réflexe naturel pour chercher sur Internet. Un moteur et portail local, bien implanté, qui a tenu tête longtemps à Google.

Même sur un marché “petit” en population, on peut avoir un moteur solide, apprécié, et pas du tout estampillé Silicon Valley.


14. DuckDuckGo – la réponse à “je ne veux plus être tracé” (2008)

DuckDuckGo a construit sa réputation sur un message clair : pas de tracking massif, pas de profilage agressif. Les parts de marché restent modestes, mais son poids symbolique est énorme.

Il montre qu’un moteur peut fonctionner sans transformer chaque clic en donnée publicitaire. Non, la pub ultra ciblée et le profilage ne sont pas une loi de la nature.


15. Qwant – l’alternative “made in Europe” (2013)

Avec Qwant, l’Europe tente une alternative qui met en avant la protection de la vie privée et un positionnement non américain. Sa part de marché reste limitée, mais le message est clair : on peut vouloir un moteur de recherche aligné sur d’autres valeurs.

Qwant rappelle que la recherche est aussi un sujet politique et culturel, pas seulement technique.


Et Google dans tout ça ? Le boss, pas le propriétaire du web

Évidemment, difficile de parler de moteurs sans mentionner Google. Arrivé à la fin des années 90 avec son fameux PageRank, il améliore fortement la pertinence des résultats, propose une interface d’une simplicité désarmante, et une vitesse qui met une claque à tout le monde.

Résultat :

  • il écrase la plupart des concurrents grand public,
  • il devient la porte d’entrée par défaut pour des milliards d’utilisateurs,
  • il bâtit autour un gigantesque écosystème (Gmail, Maps, YouTube, Android…) dopé à la publicité.

Mais factuellement :

  • Google n’a pas inventé l’indexation,
  • n’a pas inventé le moteur de recherche,
  • n’a pas inventé Internet, ni le web, ni l’e-mail.

Il a pris une idée existante, l’a poussée beaucoup plus loin, et a gagné la guerre. Ce qui est déjà largement suffisant pour l’histoire. Mais ça ne fait pas de lui l’alpha et l’oméga du réseau.


Google n’est pas Internet (et Internet ne lui demande pas la permission)

Confondre Google et Internet, c’est un peu comme confondre une gare et tout le réseau ferroviaire : pratique, centrale, incontournable… mais pas le train, pas les rails, pas les destinations.

On peut accéder à un site :

  • en tapant directement son adresse,
  • via un autre moteur,
  • depuis une application,
  • via un lien dans un mail ou un message.

Internet, ce sont des protocoles, des serveurs, des câbles, des routeurs, des milliers de services. Google n’est qu’un gros locataire très visible dans cet immeuble gigantesque.


Conclusion : 15 moteurs, 1 mise au point

Archie, WebCrawler, Lycos, AltaVista, Yahoo!, Excite, Ask, HotBot, Bing, Baidu, Yandex, Naver, Seznam, DuckDuckGo, Qwant… Chacun a laissé une trace dans la manière dont on “cherche sur Internet”.

Google domine aujourd’hui, c’est indéniable. Mais l’histoire montre que la domination change, que des alternatives existent, et que la recherche ne se résume pas à un seul acteur. Se rappeler que Google n’est qu’un moteur parmi d’autres, c’est déjà reprendre un peu de recul sur notre manière d’utiliser le web.

Internet était là avant Google, et il sera encore là après. Et lui, pour le coup, ne se reformule pas au bon vouloir d’un algorithme.

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